La place accordée aux entreprises américaines et chinoises, leaders du marché de l’hébergement de données et des services en lignes, pose question aux acteurs du Vieux continent. L’un des fondateurs du projet, Scaleway, a annoncé son retrait.
Par Alexandre Piquar – Publié le 22 novembre 2021 à 20h53 – Mis à jour le 22 novembre 2021 à 20h55
Gaia-X est-il un projet assez ambitieux ? Peut-il vraiment changer la donne ? Ces questions continuent d’accompagner l’avancée de cette alliance d’entreprises créée en 2020 pour faire émerger un écosystème européen dans le « cloud », l’informatique dématérialisée. Certains regrettent notamment la place accordée dans le projet aux leaders du marché de l’hébergement de données et des services en lignes, les entreprises américaines et chinoises.
Le deuxième sommet annuel de Gaia-X, tenu du 18 au 19 novembre, s’est ouvert sur une petite polémique autour de la présence d’Alibaba et Huawei parmi les seize sponsors de l’événement : certes, le fournisseur de cloud et le géant des télécoms chinois sont membres de l’association, mais leur parrainage a fait grincer quelques dents en interne, a rapporté le site Politico le 17 novembre.
« Objectifs détournés »
Dans la foulée, le 18 novembre, un des 22 membres fondateurs, Scaleway, a annoncé son retrait de Gaia-X en raison de la présence jugée trop importante des acteurs américains comme Microsoft, Google ou Amazon, qui contrôle environ 70 % du marché : « Les objectifs de l’association, quoique louables au départ, sont de plus en plus détournés et contrariés », explique Yann Lechelle, le PDG de cette entreprise française d’hébergement et de logiciels de « cloud », filiale de l’opérateur télécoms Iliad (fondé par Xavier Niel, actionnaire à titre individuel du Monde). Pour le démissionnaire, Gaia-X « n’avance pas » et ne fait que « renforcer le statu quo, c’est-à-dire une concurrence déséquilibrée » sur le marché.
Concrètement, Scaleway regrette la forte activité des entreprises américaines, aux moyens importants, dans les comités techniques de Gaia-X. Ces critiques ont connu quelques échos : « Comme l’ont dit les ministres de l’économie français et allemand, Bruno Le Maire et Peter Altmaier, en présentant Gaia-X en juin 2020, il s’agit de faire naître “une véritable infrastructure de données européenne”. Je crains que ça ne puisse pas être le cas si Gaia-X ne porte pas plus d’attention aux acteurs vraiment européens du cloud », a tweeté Quentin Adam, le PDG de Clever Cloud, membre de l’association et cofondateur avec Scaleway d’Euclidia, une initiative d’éditeurs de logiciel européens du secteur.
« Les GAFAM ont gagné, a renchéri sur sa page Linkedin Alain Garnier, le PDG de Jamespot, un éditeur d’une suite de logiciels de bureautique en ligne, qui n’est pas membre de Gaia-X. Si on veut être indépendant, il faut être indépendant, sinon on ne fera pas du cloud européen, on fera de la vente de cloud américain ou chinois en Europe. » Ces reproches ne sont pas cantonnés à ces acteurs français de taille modeste : en Allemagne, le journal économique Handelsblatt a par exemple évoqué un sentiment de « désillusion » autour de Gaia-X, notamment lié à la « lourdeur » du projet, passé de 22 à 200 puis 300 membres.
Il vous reste 47.26% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
Lire l’article sur le site du Monde : https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/11/22/cloud-europeen-le-projet-gaia-x-avance-mais-reste-critique_6103190_3234.html